Une nouvelle ordonnance précise les modalités des relations contractuelles dématérialisées entre assureurs et assurés. Applicable au 1er avril 2018 et intégré au Code des assurances, le texte impose de nouvelles obligations afin de renforcer la protection du client.

Les assureurs ne l’ont pas attendue pour avancer dans la dématérialisation de leurs relations contractuelles, mais l’ordonnance signée le 4 octobre dernier pose des précisions utiles pour éviter les malentendus. « Cette ordonnance est la bienvenue, estime François Leneveu, président du courtier vie sur Internet Altaprofits. Elle adapte la législation aux évolutions de la technologie et des comportements du consommateur. Le fait que le Code des assurances soit modifié est une source de légitimité pour tout le monde. »

Dans l’ensemble, « les nouveautés visent plus à protéger l’assuré qu’à simplifier les processus de l’assureur », souligne Nicolas Roose, associé du cabinet Adequation Advisory. L’assureur ou distributeur doit ainsi s’assurer de l’accord explicite du client pour s’engager dans une relation dématérialisée ; il doit vérifier que « ce mode de communication est adapté à [sa] situation », que le client est « en mesure de prendre connaissance de ces informations et documents sur le support durable envisagé », etc. Pour éviter toute perte de contact avec l’assuré, l’assureur devra aussi effectuer une fois par an une vérification des adresses email. Une certaine lourdeur qui aura comme léger avantage, selon Nicolas Roose, « de fiabiliser les bases client et donc les campagnes marketing mail ».

Mode d’échange unique

Seule mesure réellement simplificatrice du point de vue des assureurs : la possibilité de préciser dans le contrat que le service fourni sera exclusivement de nature électronique. « Cela permettra de délimiter un mode d’échange unique, d’éviter les processus mélangés entre papier et digital », explique Nicolas Roose. Pour François Leneveu, la question de la réversibilité, qui reste possible, est importante : « Ce qui est bien pour le consommateur à un moment peut ne plus l’être plus tard, on ne peut pas figer son avis. Le texte est bien fait, mais il est moins précis sur la gratuité de la réversibilité. »

Point important : l’ordonnance précise la notion de « support durable » qui se limitait auparavant dans les faits… au papier. Désormais, le support durable peut explicitement être numérique. C’est le cas par exemple des espaces clients sécurisés qui devront désormais rester accessibles au moins cinq ans après la fin de la relation contractuelle. Une contrainte qui aura un coût certain pour les assureurs ou distributeurs. « L’idée est bonne, mais ce n’est pas forcément viable, estime François Leneveu. Il est compliqué de maintenir une relation avec un ancien client alors qu’il n’y a plus de contrat. D’autant que, s’il a besoin de quelque chose, on peut retrouver le document dans nos archives. Ça ne paraît pas très réaliste, et c’est en même temps très lourd et coûteux économiquement. » Cette mesure, qui va dans le sens de la réappropriation des données personnelles, peut être d’autant plus lourde que ces espaces devront être toujours plus sécurisés. « Les espaces clients ne sont généralement pas assez protégés pour assurer une accessibilité sécurisée à des données très personnelles, comme les questionnaires médicaux, qui devront désormais y être disponibles. Les assureurs seront donc obligés de renforcer leur protection », explique Nicolas Roose.

Autre mesure d’alignement de la valeur du numérique et du papier : « L’envoi recommandé électronique est équivalent à l’envoi par lettre recommandée », précise désormais le Code des assurances. La question des process de traitement de ces documents pourra se poser pour certains, et un décret devra préciser ultérieurement la question de « l’horodatage ».

Baisse des coûts

La dématérialisation des relations contractuelles est avant tout une source d’économie pour les entreprises d’assurance ou les banques. « Les assureurs et banquiers ont l’opportunité d’augmenter leurs marges, estime François Leneveu. Dans les frais de gestion d’un contrat d’assurance vie par exemple, le coût du papier, de l’envoi des courriers etc. pèse très lourd. Est-ce que le client qui accepte de passer au digital peut obtenir une ristourne, correspondant à la baisse des frais de gestion ? On ne parle pas de ce point. »